mercredi, 25 mars 2020 06:02

COVID-19 : VIVRE ENFERMÉ OU MOURIR LIBRE ? EST- CE LA BONNE QUESTION ?

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Pour tenter de juguler la propagation de la pandémie du coronavirus, le gouvernement français a pris des mesures de confinement de la population, mesures néanmoins assorties d'un certain nombre d'exceptions pour les courses alimentaires de 1ère nécessité, pour raisons médicales, pour raisons familiales sérieuses, pour assurer le maintien d'une activité sportive ou la promenade des animaux... .

Ces mesures constituent sans aucun doute une atteinte à un certain nombre de libertés fondamentales : la liberté d'aller et venir, la liberté de réunion et la liberté de travailler....

Certains disent «  trop de libertés bafouées pour une efficacité non démontrée», d'autres: « les mesures prises sont insuffisantes pour empêcher le virus de progresser : il faut prononcer une interdiction totale de circuler, sinon les médecins seront incapables de faire face aux cas graves et ils devront choisir qui aider à vivre et qui abandonner à son propre sort» . 

Le droit à la vie est une liberté fondamentale, protégée notamment par l’article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Les mesures qui ne respectent pas le droit à la vie sont- elles illégales ?

Comment faire des choix entre plusieurs libertés fondamentales?

Les professionnels de santé et l'exigence d'un confinement total de la population

Le 22 mars 2020, des professionnels de santé ont demandé au Conseil d'Etat de contraindre le gouvernement à décréter un confinement total, au nom de la liberté protégeant le respect du droit à la vie.

En effet, ces professionnels de santé ( syndicat des jeunes médecins, intersyndicale des internes, Ordre des Médecins) expliquent que les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre le covid-19 portent une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie dans la mesure où elles ne permettent pas suffisamment de stopper la propagation du virus et entraîneront ainsi la multiplication des décès..

Ces professionnels de santé ont donc saisi le Conseil d' Etat pour qu'il soit enjoint au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de prononcer un confinement total de la population par la mise en place de mesures visant à : - **l’interdiction totale de sortir de son lieu de confinement sauf autorisation délivrée par un médecin pour motif médical sauf autorisation délivrée par un médecin pour motif médical ; ** l’arrêt des transports en commun ; ** l’arrêt des activités professionnelles non vitales (alimentaire, eau et énergie, domaines régaliens) ; -** l’instauration d’un ravitaillement de la population dans des conditions sanitaires visant à assurer la sécurité des personnels chargés de ce ravitaillement/

Ce choix des professionnels de santé pose notamment 2 questions.

La restriction des libertés fondamentales au nom de la sauvegarde de la santé publique peut-elle s'accepter sans conditions? La protection de la vie s'arrête-t-elle à la lutte contre le covid-19?

La réponse du Conseil d'Etat du 22 mars 2020

Dans sa réponse le  Conseil d'Etat définit les conditions aux restrictions des libertés fondamentales:

" Si un confinement total de la population dans certaines zones peut être envisagé, les mesures demandées au plan national ne peuvent, s’agissant en premier lieu du ravitaillement à domicile de la population, être adoptées, et organisées sur l’ensemble du territoire national, compte tenu des moyens dont l’administration dispose, sauf à risquer de graves ruptures d’approvisionnement qui seraient elles-mêmes dangereuses pour la protection de la vie et à retarder l’acheminement des matériels indispensables à cette protection. En outre, l’activité indispensable des personnels de santé ou aidants, des services de sécurité de l’exploitation des réseaux, ou encore des personnes participant à la production et à la distribution de l’alimentation rend nécessaire le maintien en fonctionnement, avec des cadences adaptées, des transports en commun, dont l’utilisation est restreinte aux occurrences énumérées par le décret du 16 mars 2020. Par ailleurs, la poursuite de ces diverses activités vitales dans des conditions de fonctionnement optimales est elle-même tributaire de l’activité d’autres secteurs ou professionnels qui directement ou indirectement leur sont indispensables, qu’il n’apparaît ainsi pas possible d’interrompre totalement. Par suite, il n’apparaît pas que le Premier ministre ait fait preuve d’une carence grave et manifestement illégale en ne décidant pas un confinement total de la population sur l’ensemble du territoire selon les modalités demandées par le syndicat requérant".

Cette position peut se résumer ainsi :

  1. La restriction des libertés fondamentales doit être nécessaire, adaptée et proportionnée à l'objectif de sauvegarde fondamentale de santé publique poursuivi.

  2. Le respect du droit à la vie ne se limite pas à la lutte contre l'épidémie: la rupture d'approvisionnement est aussi dangereuse pour la protection de la vie. Or, un Etat, qui n'est pas totalitaire,  ne peut assurer lui-même le ravitaillement à domicile de la population sur l’ensemble du territoire national, compte tenu des moyens dont l’administration dispose.

Mais le Conseil d'Etat se positionne aussi sur le fondement de la demande présentée par les professionnels de santé : le droit à la vie est respecté par le décret du 20 mars 2020 et les arrêtés ministériels :

« En l’état actuel de l’épidémie, si l’économie générale des arrêtés ministériels et du décret du 16 mars 2020 ne révèle pas une telle carence, ( non respect du droit à la vie), celle-ci est toutefois susceptible d’être caractérisée si leurs dispositions sont inexactement interprétées et leur non-respect inégalement ou insuffisamment sanctionné. EX-- caractère imprécis du déplacement pour motif de santé, -- des déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective, et aux besoins des animaux de compagnie », fonctionnement des marchés ouverts, sans autre limitation que l’interdiction des rassemblements de plus de cent personnes -- de la surveillance du respect des gestes "barrière".

En conséquence, le Conseil d'Etat demande au gouvernement de prendre d'autres mesures pour mieux définir à la fois ses moyens de sauvegarde de la santé publique et ses restrictions de libertés fondamentales:

"Il est enjoint au Premier ministre et au ministre de la santé, de prendre dans les quarante-huit heures les mesures suivantes :

- préciser la portée de la dérogation au confinement pour raison de santé ;
- réexaminer le maintien de la dérogation pour « déplacements brefs, à proximité du domicile » compte tenu des enjeux majeurs de santé publique et de la consigne de confinement ;

  • évaluer les risques pour la santé publique du maintien en fonctionnement des marchés ouverts, compte tenu de leur taille et de leur niveau de fréquentation." 

( ce qui explique la fermeture des marchés couverts et des marchés et la nouvelle définition du jogging diffusées le 23 mars 2020)

Le choix du confinement apparaît donc comme un délicat exercice d'équilibre entre le respect des libertés fondamentales et le respect de toutes les facettes du droit à la vie:il exige la plus grande vigilance des citoyens.

Ces dilemmes ne se posent pas pour tous dans les mêmes termes :

Hier, un quotidien de la Réunion publiait l'interview d'un jeune malgache confronté à l'impossibilité pour lui de respecter le confinement : «  vous me dites de respecter le confinement pour ne pas mourir du covid-19, mais si je ne pêche pas et si je ne vends pas mes poissons comment ferai-je pour survivre?

LE DROIT ET LES LIBERTES FACE AU CORONAVIRUS : LA LECTURE DE MEDOCEAN


Le droit à la vie et les devoirs d'un homme libre

"La presse écrite est en danger ; aidons la à préserver leur indépendance et leur liberté, en achetant leurs publications papier ou en ligne ; il ne peut y avoir de presse gratuite, écrite ou sur internet, sans dépendances ; il est en effet possible d'acheter le journal en ligne via les applications IOS et Androïd " cf lequotidien.re 

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Sur la santé revenue 
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.
Paul Eluard

Lu 11951 fois Dernière modification le lundi, 20 avril 2020 17:04

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